Fabienne le Sager : Nous cherchons à optimiser les sources d’adresses utilisées
|
Chez Médiamétrie, acteur majeur de la mesure d’audience en France, opérant sur les médias TV/vidéo, audio et digital, le téléphone est stratégique pour ses recrutements d’échantillons. Fabienne le Sager, Directrice du département statistique de l’institut, fait le point sur les défis de la joignabilité téléphonique.
|
Le téléphone est une source importante de recrutement pour Médiamétrie. Comment faites-vous face aux défis de la joignabilité ? Quelles pistes exploitez-vous pour le futur du recrutement des sources ?
Fabienne le Sager : Le défi de la joignabilité se joue à deux niveaux. Tout d’abord au niveau des sources d’adresses utilisées et ensuite à celui de la gestion des appels.
Sur le premier axe, une de nos réponses est la multiplicité des sources d’adresses. On sait par exemple que les personnes joignables sur téléphone fixe sont différentes de celles joignables sur téléphone mobile et le fait d’utiliser ces sources complémentaires permet de maintenir la représentativité de nos échantillons.
Par ailleurs, sur certaines cibles spécifiques, le recours à des adresses qualifiées est parfois nécessaire. En effet, certaines de nos études téléphoniques nécessitent de respecter des quotas quotidiens, c’est le cas de EAR>National, l’étude de référence de la mesure d’audience de la Radio, et pour le recrutement de nos panels de mesure d’audience, nous sommes souvent amenés à rechercher des cibles fines ou plus difficilement joignables comme les jeunes et les CSP-.
Médiamétrie explore aussi des pistes d’évolutions méthodologiques des protocoles de recueil qui permettraient de maximiser les taux de réponse de certaines cibles.
Sur le deuxième axe, l’enjeu est que les individus continuent à décrocher lorsque nous les appelons, dans un contexte réglementaire imposé par l’Arcep, toujours plus contraignant avec dernièrement la mise en place de numéros d’appels prédéfinis (NPV-Numéros Polyvalents Vérifiés), identifiables par la population, pour les instituts d’étude comme pour tout autre centre d’appels (démarchage téléphonique…). Pour cela, nous adaptons par exemple les jours et les horaires d’appels en fonction des disponibilités des personnes que nous souhaitons interroger.
Nous cherchons également à optimiser les sources d’adresses utilisées, ainsi que leur cycle de vie dans nos différents dispositifs. Médiamétrie explore aussi des pistes d’évolutions méthodologiques des protocoles de recueil qui permettraient de maximiser les taux de réponse de certaines cibles (protocole de collecte multi-mode, échantillons rotatifs…), tout en maitrisant les coûts de recueil.
A terme, compte tenu de l'évolution de la joignabilité, comment vont cohabiter mesures d'audience et ciblage data ?
F.S. : Ciblage data et mesure d’audience ne sont pas concurrents, bien au contraire. Le ciblage intervient en amont de la chaîne, à des fins d’optimisation des campagnes publicitaires, alors que la mesure d’audience intervient en aval pour établir un bilan des campagnes, à la fois quantitatif et qualitatif. De nombreux ciblages sont aujourd’hui proposés sur le marché et leur qualité ne peut être évaluée qu’au travers de mesures neutres, indépendantes et auditées comme le sont par exemple les mesures d’audience. De plus, l’entrée en vigueur du RGPD et la fin annoncée des cookies a remis les panels au centre des mesures d’audience.
Mesure d’audience et data sont bien complémentaires et cohabiteront encore davantage à l’avenir dans les solutions proposées au marché.
De nombreuses solutions de ciblage ou de mesure des duplications entre éditeurs ou supports utilisent d’ailleurs les panels comme base d’apprentissage. A l’inverse, la data apporte une précision que les panels ne peuvent avoir, ce qui explique le développement des approches hybrides, comme les mesures Internet Global ou Internet Vidéo. Mesure d’audience et data sont donc bien complémentaires et cohabiteront encore davantage à l’avenir dans les solutions proposées au marché.
Que vont vous apporter les travaux du CESP sur la qualité des sources ?
F.S. : Les sources aléatoires ne sont plus suffisantes aujourd’hui pour constituer nos échantillons et recruter nos panels. Médiamétrie utilise déjà des adresses pré-qualifiées issues de ses propres enquêtes ou de prestataires. Les travaux du CESP devraient permettre à Médiamétrie de disposer d’un référentiel commun de « bonnes pratiques » en matière de sources d’adresses à utiliser dans nos enquêtes.
Disposer de recommandations claires et objectives, en amont des audits, nous permet de rassurer nos clients sur l’adéquation de nos méthodes aux standards de qualité préconisés par le Comité Scientifique du CESP. Par ailleurs, les travaux du CESP vont nous apporter des arguments supplémentaires dans les discussions avec nos prestataires afin d'obtenir davantage de transparence sur leurs méthodes.
Numérotation téléphonique : une mesure de l’ARCEP qui peut impacter les enquêtes téléphoniques
L’autorité de régulation des communications électroniques des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) a adopté un nouveau plan de numérotation téléphonique interdisant aux numéros traditionnels d’être utilisés comme plateforme téléphonique de masse (appels automatisés). Cela inclut le démarchage commercial et les enquêtes téléphoniques. Des numéros dédiés (appelés aussi numéros polyvalents vérifiés) seront affectés à ces appels. Cela rend plus facile les identifications et blocages.
L’interprofession des études, incarnée par la branche Etudes de Syntec Conseil est concernée par ce sujet. Selon nos informations, des discussions sont en cours entre Syntec et l’Arcep afin de faire valoir les intérêts des instituts.
|
|